Ecrire « pour soi »

Écrire à longueur de journée, le rêve du rédacteur ?

Oui, parce que par définition la matière textuelle est un pur bonheur à manier. Oui même quand ça bloque, parce qu’il y a des objectifs, des dates de rendu, des habitudes de rédaction aussi… Donc même fatigué, après une nuit courte et deux cafés serrés, le rédacteur finit par émerger et enfiler les mots pour former des phrases. La pratique quotidienne alliée à une connaissance approfondie des sujets permettent de se réfugier dans des réflexes et de produire. Oh certes, les textes ne sont pas aussi enlevés ou brillants, mais à part les professionnels de l’écriture (et notre ego), il y aura peu de lecteurs pour le pointer.

En tant que Community Manager, il y a également une belle part de statistiques, d’analyses diverses et une spontanéité qui permettent de gérer ses journées en profitant de plages temporelles plus faciles pour écrire.

Bien, et alors le soir, arrive-t-on à rédiger encore pour soi ?

La réponse est évidemment plus mitigée. Entre les mails d’amis qui voudraient bien avoir des nouvelles, ceux à qui on voudrait raconter tant et tant de choses et qu’on finit par appeler (ça va plus vite), les débordements de travail en soirée (si si, ça arrive de temps en temps) et la vie en général (courses, repas, pitchounes qui veulent leur histoire du soir et canapé-TV qui n’attendent que nous), difficile d’être régulier !

Pourtant – et c’est là que l’auteur en puissance surgit – il y a ces couchers impossibles sans avoir jeté sur le papier ces pensées qui tournent, cette soirée bénie où après avoir travaillé un peu on se retrouve à taper au kilomètre sur le premier support qui vient (traitement de texte, forum, blog, mail à soi-même…) et alors c’est une libération. Les mots coulent, se lâchent, les émotions affleurent et laissent cours aux sentiments profonds, les effets de style ne sont plus que ludiques et spontanés… Le poignet en feu (ceux et celles qui écrivent encore avec un stylo comprendront), les yeux rouges de fatigue, le carnet tombe au pied du lit alors qu’on tend le bras pour éteindre la lumière et s’endormir dans ce flottement béni qui suit ces temps intenses de création pure.

Nulle relecture, correction ou retouche cosmétique : le texte est brut de décoffrage, début, milieu ou fin d’on ne sait quoi mais présent, vif et à vif. Les fautes d’orthographe et de grammaire s’oublient au profit d’une sensation vertigineuse de liberté. Nul jugement mais une vraie purge pour repartir le lendemain apaisé. Nulle velléité de publication non plus mais les mots pour le plaisir. Enfin ! Oui, celui-là, qu’on s’accorde comme une maniaque du régime craque pour un chou à la crème ou un beignet gras. Cette rémanence qui se libère, s’ébat et reprend les rênes.

Les papiers s’entassent, les cahiers pleins plongent au fond de cartons ou sont recouverts de dessins enfantins. Oh ! Il n’y a rien à sauver : écrire au kilomètre n’est qu’une soupape de sécurité pour ces « hantés de l’écriture » dont la tête est souvent pleine de voix qui ne leur appartiennent pas vraiment, de ces personnages en demi-teintes faute d’avoir été vraiment travaillés, de ces archétypes dont on ne sait que faire aussi… Pour ne pas se perdre, il faut donc les laisser sortir : question d’hygiène mentale, sinon on peut risquer l’enfouissement.

Ah, et rappelez-vous : dans cette dimension quasi mystique il n’y a aucun risque de se perdre, on ne fait qu’un peu de place pour que les prochaines émotions aient l’espace de s’ébattre… Pour mieux être retranscrites à leur tour 😉

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